« Crédibilité des plaignants ou des victimes » : différence entre les versions

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Principes généraux

Voir également: Analyzing Testimony

Dans sa décision visant à évaluer la crédibilité d’un plaignant, le juge doit considérer la preuve dans son contexte global et aborder toute contradiction interne. Il ne peut ignorer les éléments de preuve qui vont à l’encontre de la conclusion.[1]

Le fait que le plaignant « poursuive une plainte » ne peut être utilisé pour étayer la crédibilité sans avoir pour effet d’inverser le fardeau de la preuve.[2]

La preuve de la relation globale avec un partenaire domestique peut être établie « pour établir la nature véritable et complète de la relation du couple dans la mesure où elle est raisonnablement capable d'établir le récit contextuel au cours duquel les événements ou les faits qui auraient eu lieu se sont produits » ou lorsqu'elle peut établir le mobile ou l'animosité de l'accusé ou lorsqu'elle est pertinente pour expliquer l'omission de signaler. Le juge doit peser la valeur probante par rapport à l'effet préjudiciable.[3]

Il peut être utile d'admettre des déclarations antérieures cohérentes pour le récit. Elles peuvent être essentielles « pour comprendre le déroulement des événements, par exemple, pour éliminer les lacunes ou expliquer pourquoi si peu a été fait pour mettre fin à l'abus ou pour traduire l'auteur présumé en justice ». Elles peuvent également être censées « comprendre comment et quand je me plains que mon histoire ait été révélée ».[4]

Comportement après l'infraction

Il n'existe pas de règle absolue sur la façon dont une victime réagira après un événement traumatisant tel qu'une agression sexuelle.[5]

Plainte tardive ou récente

La pertinence d'une plainte tardive est « contextuelle et varie d'un cas à l'autre ».[6]

Dans le contexte d'une agression sexuelle, un retard dans la divulgation, en soi, ne permettra pas de tirer de conclusions défavorables sur la crédibilité des témoins.[7]

Incapacité d'expliquer les raisons de la fabrication

Il est bien établi que la Couronne ne peut pas demander à un accusé pourquoi un plaignant mentirait et ensuite utiliser l'absence de réponse comme raison pour déduire la culpabilité.

Certains suggèrent que cette interdiction s'appliquerait plus généralement lorsque l'absence de preuve démontrant une raison de mentir est utilisée pour déduire la culpabilité.[8]

Absence de motif pour mentir

L'absence de motif pour mentir peut être pertinente pour évaluer la crédibilité, en particulier dans les cas où l'accusé allègue une fabrication et un motif.[9] Lorsqu'il examine l'absence de motif de mentir ou de preuve réfutant un motif de mentir, le juge de première instance doit tenir compte de deux risques associés :[10]

  1. "l'absence de preuve qu'un plaignant a un motif de mentir (c'est-à-dire qu'il n'y a aucune preuve dans un sens ou dans l'autre) ne peut pas être assimilée à une preuve réfutant un motif particulier de mentir (c'est-à-dire une preuve établissant que le motif n'existe pas), car ce dernier nécessite des preuves et constitue donc une indication plus forte de crédibilité - ni l'un ni l'autre n'est concluant dans une analyse de crédibilité ; et"
  2. "la charge de la preuve ne peut pas être renversée en exigeant de l'accusé qu'il démontre que le plaignant a un motif de mentir ou qu'il explique pourquoi un plaignant a fait ces allégations".
  1. R c G(W), 1999 CanLII 3125 (ON CA), 137 CCC (3d) 53, par Finlayson JA aux pp. 13, 14, 17-19
    R c DA, 2012 ONCA 200 (CanLII), 289 OAC 242, par MacPherson JA
  2. R c MQ, 2010 ONSC 61 (CanLII), OJ No 378, par Hill J
  3. , ibid.
    R c F(JE), 1993 CanLII 3384 (ON CA) (hyperliens fonctionnels en attente) à 472 (CCC)
    R c Curto, 2008 ONCA 161 (CanLII), 230 CCC (3d) 145, par Rosenberg JA, au para 33
  4. , ibid.
    voir aussi Prior Consistent Statements
  5. R c DD, 2000 SCC 43 (CanLII), [2000] 2 SCR 275, par Major J, au para 65 ("A trial judge should recognize and so instruct a jury that there is no inviolable rule how people who are victims of trauma like a sexual assault will behave. ... In assessing the credibility of a complainant, the timing of the complaint is simply one of circumstance to consider in the factual mosaic of a particular case. A delay in disclosure, standing alone, will never give rise to an adverse inference against the credibility of the complainant. ")
    R c JA, 2010 ONCA 491 (CanLII), 261 CCC (3d) 125, par MacPherson JA, au para 17
  6. , ibid.
  7. DD, supra ("Reasons for delay are many and at least include embarrassment, fear, guilt, or a lack of understanding and knowledge. In assessing the credibility of a complainant, the timing of the complaint is simply one circumstance to consider in the factual mosaic of a particular case. A delay in disclosure, standing alone, will never give rise to an adverse inference against the credibility of the complaint.")
  8. R c VY, 2010 ONCA 544 (CanLII), 258 CCC (3d) 281, par LaForme JA, aux paras 25 à 26
    R c MP, 2010 ONSC 5653 (CanLII), par Hill J, au para 323
    (« Un juge des faits ne peut conclure à la culpabilité en acceptant le plaignant comme témoin crédible et en considérant ensuite que l'accusé n'a présenté aucune explication crédible des allégations »)
  9. R c Gerrard, 2022 SCC 13 (CanLII) (hyperliens fonctionnels en attente), par Moldaver J ("“Absence of evidence of motive to lie, or the existence of evidence disproving a particular motive to lie, is a common sense factor that suggests a witness may be more truthful because they do not have a reason to lie... Lack of evidence of a complainant’s motive to lie may be relevant in assessing credibility, particularly where the suggestion is raised by the defence ")
    R c Stirling, 2008 SCC 10 (CanLII) (hyperliens fonctionnels en attente), par Bastarache J, aux paras 10 à 11
    R c Ignacio, 2021 ONCA 69, 400 CCC (3d) 343, par Pepall JA, aux paras 38 and 52
    cf. R c Bartholomew, 2019 ONCA 377 (CanLII), 375 CCC (3d) 534, par Trotter JA
    cf. R c MS, 2019 ONCA 869 (CanLII), [2019] OJ No 5633, par curiam
    cf. R c BH, 2022 ONCA 812 (CanLII (hyperliens fonctionnels en attente), par curiam
  10. Gerrard, supra
    R c Swain, 2021 BCCA 207 (CanLII), 406 CCC (3d) 39, par Voith JA, aux paras 31 à 33
Absence d'embellissement ou d'exagération

L'absence d'embellissement ou d'exagération peut être un facteur pertinent dans l'examen de la crédibilité. Elle est principalement utilisée pour réfuter les suggestions de fabrication et de motif de fabrication. Elle ne peut pas être utilisée pour renforcer la crédibilité.[1]

Il s'ensuit également que la présence d'embellissements est un facteur qui pèse contre la crédibilité du plaignant.

  1. Gerrard, supra ("Lack of embellishment may also be relevant in assessing a complainant’s credibility ... lack of embellishment is not an indicator that a witness is more likely telling the truth because both truthful and dishonest accounts can be free of exaggeration or embellishment. Lack of embellishment cannot be used to bolster the complainant’s credibility — it simply does not weigh against it. It may, however, be considered as a factor in assessing whether or not the witness had a motive to lie.")

Crédibilité dans les infractions liées aux agressions sexuelles

Un juge commet une erreur juridique en se fondant sur des « idées préconçues sur le comportement des victimes sexuelles ».[1]

La loi vise à éradiquer les « mythes » du « comportement approprié » dans les agressions sexuelles.[2]

Ces règles contre les mythes ne peuvent cependant pas être utilisées pour renforcer artificiellement la crédibilité.[3]

Délai de dépôt des plaintes

La doctrine des plaintes récentes dans les affaires d'agression sexuelle n'existe pas au Canada. Le fait de ne pas déposer une plainte en temps opportun en cas d’agression ou d’abus sexuel ne peut pas être utilisé pour tirer une conclusion défavorable en matière de crédibilité.[4]

Abolition des règles relatives à la plainte spontanée

275 Les règles de preuve qui concernent la plainte spontanée sont abolies à l’égard des infractions prévues aux articles 151, 152, 153, 153.1 et 155, aux paragraphes 160(2) et (3) et aux articles 170, 171, 172, 173, 271, 272 et 273.

L.R. (1985), ch. C-46, art. 275L.R. (1985), ch. 19 (3e suppl.), art. 11; 2002, ch. 13, art. 12; 2019, ch. 25, art. 99


[annotation(s) ajoutée(s)]

CCC (CanLII), (Jus.)


Note: 275

Les infractions énumérées à l'art. 275 sont les suivantes :

La divulgation tardive, en elle-même, ne peut pas permettre de tirer une conclusion défavorable contre le plaignant dans une affaire d'agression sexuelle.[5]

Cependant, le tribunal peut utiliser la preuve du dépôt de la plainte comme « preuve narrative dans le but autorisé de montrer le fait et le moment d'une plainte, ce qui peut ensuite aider le juge des faits à évaluer la véracité ou la crédibilité ».[6] Ces déclarations ne peuvent pas être utilisées pour « confirmer la véracité des allégations formulées sous serment ».[7]

Comportement de la victime

Dans les cas d'agression sexuelle, il a été déclaré qu'une analyse stricte du caractère raisonnable des actions de la plaignante en tant que « comportement humain réactif est variable et imprévisible » et qu'il existe un risque de « pensée stéréotypée quant à la façon dont une plaignante devrait réagir dans un scénario donné ».[8]

Il n'existe pas de « règle inviolable sur la façon dont les personnes victimes d'un traumatisme comme une agression sexuelle se comporteront ».[9]

Comportement et conduite après l'infraction dans les cas d'infractions sexuelles

Le comportement d'une victime d'agression sexuelle après l'infraction peut être utilisé comme preuve circonstancielle pour corroborer la version des faits du plaignant.[10] Cela peut inclure des preuves telles que :

  • la volonté de la plaignante de se soumettre à l’examen invasif pour agression sexuelle ;[11]
  • le comportement de la plaignante immédiatement après l’agression[12]

L’absence de comportement évitant ou de changement de comportement observé [après que l’infraction aurait été commise] ne doit jamais être utilisée pour tirer une conclusion défavorable sur la crédibilité d’une plaignante.[13]

  1. R c Cepic, 2019 ONCA 541 (CanLII), 376 CCC (3d) 286, par Benotto J, aux paras 14 à 15
    R c DD, 2000 SCC 43 (CanLII), [2000] 2 SCR 275, par Major J, au para 65
    R c ARJD, 2018 SCC 6 (CanLII), [2018] 1 SCR 218, par Wagner CJ, au para 2
  2. Cepic, supra, au para 14
  3. Cepic, supra, au para 14
    R c JL, 2018 ONCA 756 (CanLII), 367 CCC (3d) 249, par Pepall JA, aux paras 46 à 47
  4. R c DD, 2000 SCC 43 (CanLII), [2000] 2 SCR 275, par Major J
  5. DD, supra, aux paras 63, 65
  6. R c Dinardo, 2008 SCC 24 (CanLII), [2008] 1 SCR 788, au para 37
  7. , ibid., au para 37
    see R c GC, [2006] OJ No 2245 (CA)(*pas de liens CanLII)
    R c Fair, 1993 CanLII 3384 (ON CA), OR (3d) 1, au para 21
  8. R c Lally, 2012 ONCJ 397 (CanLII), par Keast J aux pages 105 à 113
  9. DD, supra, au para 65
  10. R c JJA, 2011 SCC 17 (CanLII), [2011] 1 SCR 628, par Charron J, aux paras 40 à 41
    R c Mugabo, 2017 ONCA 323 (CanLII), 348 CCC (3d) 265, par Gillese JA, au para 25 ("It has long been held that post-event demeanour of a sexual assault victim can be used as circumstantial evidence to corroborate the complainant’s version of events")
  11. , ibid., au para 25
  12. , ibid., au para 25
  13. R c ARD, 2017 ABCA 237 (CanLII), 353 CCC (3d) 1, par Slatter JA, au para 64

Voir également